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Quand l'air sec est trop humide


charles.muller
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Dans une Perspectives du dernier Science, un groupe de chercheurs signale une énigme des modèles actuels concernant la vapeur d'eau en haute troposphère. Je vous rends compte de ce que j'en ai compris, mais avec beaucoup de réserve cependant (ci-dessous les références et le communiqué), car je ne suis pas tellement familier des histoires de saturation et sursaturation.

- La vapeur d'eau échappée de la surface grimpe et atteint des régions froides de l'atmosphère. L'humidité n'est plus à l'équilibre et on est en situation de sursaturation de la VE par rapport à la glace.

- Le retour à l'équilibre s'opère normalement par condensation : d'abord des cristaux de glace se forment autour des aérosols ; ensuite ces cristaux croissent (agrègent de la VE qui se condense autour d'eux). Cela aboutit à la formation de nuages de cristaux de glace (cirrus).

- Le taux de sursaturation prévu par les modèles pour déclencher ce phénomène est d'environ 60%. Or des observations convergentes montrent que la haute troposphère en ciel clair peut dépasser les 100% de sursaturation sans déclencher de processus de condensation / croissance. Et dans les cirrus ou contrails, on observe encore des taux sursaturation de 30% alors que l'on devrait être revenu à l'équilibre (toute la VE condensée).

- Ces observations (de la VE en haute tropo) sont très incertaines, raison pour laquelle on ne considérait pas cela comme un pb. Mais pour les auteurs, l'accumulation des données depuis quelques années montre qu'il y a bien un pb de fond et un mécanisme que l'on ne modélise pas bien.

Ci-dessous, le schéma. En bas, la courbe verte est ce que l'on attend (après 60%, la sursaturation décline et revient vers 0% grâce aux noyaux de condensation et à leur croissance) ; les courbes rouge et orange sont ce que l'on observe : cela se passe comme si la condensation ou la croissance étaient supprimées.

13991medqp8.gif

Avez-vous des corrections / précisions sur cette description ?

Les auteurs disent que le sujet est important pour le climat, sans plus de précision. Quels sont selon vous les enjeux en question, notamment pour la rétroaction nuage / VE ?

***

Article :

Science 1 December 2006:

Vol. 314. no. 5804, pp. 1399 - 1402

DOI: 10.1126/science.1135199

When Dry Air Is Too Humid

Thomas Peter, Claudia Marcolli, Peter Spichtinger, Thierry Corti,1 Marcia B. Baker,2 Thomas Koop3

As moist air rises to colder regions in the atmosphere, the humidity rises above its equilibrium value over ice. To relax this metastability, the air releases its water vapor via ice cloud formation. Such atmospheric ice clouds form in two steps: First, ice nucleates in or on existing aerosol particles; second, these ice particles grow through condensation of supersaturated water vapor onto the ice surfaces. Recent field observations (1-3) call into question the basic principles underpinning the current understanding of ice cloud formation and alter the assessment of water distribution in the upper troposphere.

(...)

***

Communiqué :

Scientists want to solve puzzle of excess water vapor near cirrus clouds

A number of researchers in recent years have reported perplexing findings of water vapor at concentrations as much as twice what they should be in and around cirrus clouds high in the atmosphere, a finding that could alter some conclusions about climate change.

Now a group of European and U.S. scientists is advocating a broad research effort to solve the puzzle and understand just what is occurring in cirrus clouds, wispy sheets of ice crystals 6 to 10 miles above the Earth's surface.

"Based on our current knowledge, it shouldn't exist," said Marcia Baker, a University of Washington professor of Earth and space sciences. She is one of six climate researchers who authored a Perspectives article in the Nov. 30 edition of the journal Science promoting an extensive effort to investigate the dilemma.

Part of the problem is that many atmospheric scientists have dismissed the findings as erroneous because the current understanding of atmospheric conditions and cirrus clouds would make the water vapor anomaly impossible, Baker said. Yet a number of pieces of evidence published in peer-reviewed journals and presented at scientific meetings during the last six years have supported the finding.

Clouds and particles in the atmosphere play a significant role in regulating the Earth's temperature because they help determine how much of the sun's heat and energy is reflected back into space and they trap outgoing radiation from the Earth's surface. Cirrus clouds also are important in regulating the distribution of water vapor, the most important greenhouse gas, in the upper troposphere.

"We have thought our models of the formation and evolution of cirrus clouds are generally adequate in how they portray the role of cirrus clouds in regulating water vapor, but if the recent findings are accurate and high humidities are widespread, our assumptions could need significant adjustment," Baker said.

"The point is to bring this to the more general science audience as a broad puzzle, but also to lay the groundwork for research to solve the puzzle," she said.

Cirrus clouds form in the upper troposphere and modulate the exchange of water between the troposphere and the stratosphere. Vapor in the upper troposphere can rise into the stratosphere but tiny ice crystals can fall back toward the surface.

Outside the clouds, there are water vapor and minute atmospheric particles called aerosols, but no ice crystals. Scientists have come to expect that new ice crystals will begin to form in aerosols when vapor levels rise to the point at which they are 60 percent above equilibrium with the surrounding air. Yet measurements have shown that vapor levels can reach 90 percent to 100 percent above equilibrium without forming new ice particles.

Inside the clouds, it is expected that vapor levels above equilibrium cannot be maintained, yet evidence shows that often vapor levels are as much as 30 percent above equilibrium in large areas of clouds.

Scientists have speculated about what causes these anomalies. It is possible the aerosols might have as-yet undiscovered properties that prevent crystals from forming in some conditions, or there could be some kind of coating on the aerosols that prevents ice from forming, Baker said. There also could be some undiscovered property of ice crystals that prevents them from growing in certain conditions.

"There could be a different phase of ice at the temperatures and pressures in cirrus clouds that has a higher equilibrium for vapor," Baker said. "These are the kinds of questions for which we are trying to find answers."

###

The lead author of the Science article is Thomas Peter of the Institute for Atmospheric and Climate Science at Eidgenössische Technische Hochschule of Switzerland. Other co-authors are Claudia Marcolli, Peter Spichtinger and Thierry Corti, also of the climate institute, and Thomas Koop of Bielefeld University in Germany.

For more information, contact Baker at (206) 685-3799 or baker@ess.washington.edu; or Peter at 41-44-633 27 56 or thomas.peter@env.ethz.ch

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Dans une Perspectives du dernier Science, un groupe de chercheurs signale une énigme des modèles actuels concernant la vapeur d'eau en haute troposphère. Je vous rends compte de ce que j'en ai compris, mais avec beaucoup de réserve cependant (ci-dessous les références et le communiqué), car je ne suis pas tellement familier des histoires de saturation et sursaturation.

-

Bon, comme tu l’as si souvent dit, les chercheurs ont tendance à dire que tout est important pour le climat. Dans le cas présent, ce n’est pas faux mais il faut sérieusement nuancer.

1 les cirrus sont avec les stratocumulus marins, les nuages dont l’influence sur le bilan radiatif est la plus importante. En outre, ils sont liés, pour un e part, à la convection tropicale qui est un point clé de la dynamique du climat. Donc d’accord, in fine, c’est intéressant pour le climat. J’ai bien dit intéressant

.

2 les processus qui sont discutés ne sont pas directement pris en compte dans les modèles climatiques et ce n’est peut être pas du tout nécessaire. Par contre, ils le sont dans les modèles de cirrus. Il n’y en a pas beaucoup, entre autres, parce que les observations étaient rares jusqu’à présent. Ca s’améliore un peu depuis une vingtaine d’années mais c’est un peu comme la pêche aux poissons des grands fonds : ce n’est pas parce que tu observes un poisson biscornu que tous les autres sont pareils : tu n’échantillonnes quasiment rien.

Reste donc la physique : quels sont les mécanismes physiques en jeu : rayonnement, turbulence, cisaillement de vent, sédimentation et bien sûr la microphysique. , On construit des modèles qui prennent en compte ces mécanismes et on essaie de les valider et de les affiner par des expériences in situ (avec, tout de suite, le pb d’échantillonnage sans compter la difficulté pratique (suffit de chercher des nuages pour avoir du ciel bleu), avec, surtout des observations depuis satellite (voir MODIS et l’A train : Cloudsat, Parasol, etc. : radar, lidar, radiomètres, polarimètres etc.).

L’intérêt, c’est qu’on filtre les phénomènes marginaux pour aller directement aux phénomènes qui ont une importance à l’échelle de la planète.

A partir de ces modèles de cirrus et des observations, on va finalement construire une paramétrisation qui permettra de reproduire la statistique des cirrus (moyenne, variance et principales variabilités). Ces observations ne sont donc qu’indirectement importantes pour les simulations climatiques. Il n’est pas dit que les prendre en compte change grand-chose dans le résultat final et il faudrait surtout se garder d’en exagérer l’importance et d’en faire une caractéristique majeure.

Cela fait longtemps que les observations satellitaires montrent la présence de particules sphériques à des températures très basses : ça signifie que la surfusion est fréquente. Les mesures de vapeur d’eau à ces températures sont horriblement difficiles et les mesures microphysiques également. Il y a donc de quoi être prudent.

Le processus de nucléation dont il est question est la nucléation homogène, cad sans noyaux de condensation : est ce le cas majoritairement ? L’ensemencement de la haute tropo par les jets favorise, au contraire, la nucléation hétérogène.

Conclusion : on se précipite pas là-dessus quand on est un amateur. On attend que ça mûrisse.

De toutes façons, si on est vraiment obligés de décrire la microphysique détaillée des nuages , on risque fort de se perdre (je cite Sir John Mason, microphysicien, ancien Directeur du Met Office et Chairman du World Climate Research Programme à l’époque). Le tout , dans ce genre d’histoire est d’introduire le degré de complexité strictement nécessaire et rien de plus

Il y a plus à attendre de l’A Train parce qu’on obtiendra des observations globales et qu’on devrait pouvoir discriminer certaines propriétés radiatives majeures (émissivité, albédo) en fonction des conditions environnementales à grande échelle

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Conclusion : on se précipite pas là-dessus quand on est un amateur. On attend que ça mûrisse.

Merci des explications, bien que je n'ai pas tout compris. Remarque bien : je ne me précipite sur rien, je fais l'écho d'un travail de chercheurs que j'ai lu et dont je ne comprends pas la portée. Je n'avais pas spécialement en tête que cette "anomalie" soit porteuse d'une révolution dans nos projections, faute de quoi cela aurait été sans doute précisé dans les commentaires.

Les points que je saisis mal :

Cela fait longtemps que les observations satellitaires montrent la présence de particules sphériques à des températures très basses : ça signifie que la surfusion est fréquente. Les mesures de vapeur d’eau à ces températures sont horriblement difficiles et les mesures microphysiques également. Il y a donc de quoi être prudent.

C'est quoi les "particules sphériques" ?
Le processus de nucléation dont il est question est la nucléation homogène, cad sans noyaux de condensation : est ce le cas majoritairement ? L’ensemencement de la haute tropo par les jets favorise, au contraire, la nucléation hétérogène.

Le texte indique "lower supersaturations are sufficient for heterogeneous nucleation" (=lower than 60%). Donc à la limite, si je comprends ta remarque, le pb est encore plus aigu (c'est-à-dire qu'atteindre jusqu'à 120% de sursauration alors qu'il y a bcp d'aérosols est moins compréhensible).
les processus qui sont discutés ne sont pas directement pris en compte dans les modèles climatiques et ce n’est peut être pas du tout nécessaire.

Tu veux dire que savoir si des cirrus se forment plutôt à 50 ou 100% de sursaturation VE/glace selon la composition de la haute tropo n'a pas d'influence particulière sur les projections de la rétroaction VE et nébulosité ? C'est sans doute le cas, mais c'est justement ce genre d'enjeu que les auteurs sous-entendent et que je saisis mal. Comme les ordres de grandeur des projections de rétroactions sont finalement assez faibles (entre -2 et 2 W/m2 pour les nuages par exemple), ie faibles par rapport à l'albedo ou l'ES total des mêmes nuages, je ne sais pas exactement où commence l'importance et la caractéristique majeure ("il faudrait surtout se garder d’en exagérer l’importance et d’en faire une caractéristique majeure")
Bon, comme tu l’as si souvent dit, les chercheurs ont tendance à dire que tout est important pour le climat.

Un peu comme les amateurs... default_rolleyes.gif
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C'est quoi les "particules sphériques" ?

De satellite, on détecte la forme pas directement la phase. Il s'agit donc d'eau liquide, à des températures très basse (jusqu'à -50°)

Le texte indique "lower supersaturations are sufficient for heterogeneous nucleation" (=lower than 60%). Donc à la limite, si je comprends ta remarque, le pb est encore plus aigu (c'est-à-dire qu'atteindre jusqu'à 120% de sursauration alors qu'il y a bcp d'aérosols est moins compréhensible).

A priori, je l'interprète à l'inverse: la haute tropo est assez propre en général, c'est pour cela qu'on a de le nucléation homogène sinon, la condensation aurait lieu bien avant. Par contre, je ne sais pas trop comment ils ont fait leurs mesures ni où. J'imagine aussi que leur procédure doit être épouvantablement délicate: ils ont dû employer des chambres spéciales. Dans quelle mesure le prélèvement ne perturbe t il pas la mesure?

En plus, quand on vole dans un cirrus, on ne mesure pas une humidité relative élevée et il y a , en fait, très peu de cristaux. Suivant le niveau de vol la turbulence est plus ou moins forte: elle est la plus forte au niveau de formation des particules et la vapeur d'eau doit y être très variable spatialement et temporellement.

Tu veux dire que savoir si des cirrus se forment plutôt à 50 ou 100% de sursaturation VE/glace selon la composition de la haute tropo n'a pas d'influence particulière sur les projections de la rétroaction VE et nébulosité ? C'est sans doute le cas, mais c'est justement ce genre d'enjeu que les auteurs sous-entendent et que je saisis mal. Comme les ordres de grandeur des projections de rétroactions sont finalement assez faibles (entre -2 et 2 W/m2 pour les nuages par exemple), ie faibles par rapport à l'albedo ou l'ES total des mêmes nuages, je ne sais pas exactement où commence l'importance et la caractéristique majeure ("il faudrait surtout se garder d’en exagérer l’importance et d’en faire une caractéristique majeure")

Un peu comme les amateurs... default_blink.png

Les processus importants sont ceux qui durent et qui occupent beaucoup d'espace (on transforme des W/m2 en Joules). Or cela ne concerne que la partie sommitale des cirrus: plius bas, les particules ont sédimenté, la température est plus élevée. Ca concerne aussi la formation des cirrus autre que les cirrus convectifs qui ne sont que des extensions de cu nimb.

A mon avis, ca doit pas mofifier beaucoup l'albédo mais il est fort possible que ça soit essentiel pour les cirrus sub visibles (sans intérêt climatique si ce n'est epsilonesque)

En plus, ca ne concerne qu'une partie des cirrus

Je dirais qu'on est loin du compte malgré tout la considération que j'ai pour Marcia Baker.

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(...)

Je dirais qu'on est loin du compte malgré tout la considération que j'ai pour Marcia Baker.

Merci des nouvelles précisions. Tu as raison, la petite mention "climat" en fin de texte ne doit être qu'un produit d'appel, ce qui n'est pas vraiment rare en ce moment. Enfin, c'est toujours intéressant de mieux comprendre de quoi il retourne.
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Si on est plus sursaturé que prévu ceci augmente en principe la pression partielle de VE en haute tropo.

Cela ne risque t'il pas de faire d'avantage de "fuite" vers la strato où la VE peut jouer un rôle de GES?

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Si on est plus sursaturé que prévu ceci augmente en principe la pression partielle de VE en haute tropo.

Cela ne risque t'il pas de faire d'avantage de "fuite" vers la strato où la VE peut jouer un rôle de GES?

Comme cela je répondrais "oui" car la frontière entre tropo et strato n'est jamais qu'une convention. Mais la réponse dépend en fait du comportement attendu d'une particule d'eau à cette altitude selon la température, la pression et aussi la circulation (courants jets). Sirius doit avoir une idée plus exacte.
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Comme cela je répondrais "oui" car la frontière entre tropo et strato n'est jamais qu'une convention. Mais la réponse dépend en fait du comportement attendu d'une particule d'eau à cette altitude selon la température, la pression et aussi la circulation (courants jets). Sirius doit avoir une idée plus exacte.

Vous considérez le pb à l'envers:

les cirrus ne se formeraient parfois que dans des conditions de sursaturation plus élevées que ce que l'on pensait préalablement.

En admettant que cela soit juste, ça ne change rien à la quantité de vapeur d'eau dans la haute tropo: seules les fluctuations les plus grandes donneraient lieu à nucléation.

On est loin de la quantité moyenne de vapeur d'eau , même à méso échelle.

A moins que vous ne pensiez que l'eau vapeur passe plus facilement dans la strat que l'eau gaz mais ça n'a rien à voir. La tropopause n'est pas une membrane Gortex qui ne laisserait passer que la vapeur et pas l'eau condensée.

lPar ailleurs l'importance de d'effet de serre de la vapeur d'eau est une question de contraste de température: si la haute trop est très froide, ça ne change rien puisqu'ensuite le profil de tempé est sensiblement constant pendant un moment dans la strato avant de réaugmenter. Ca serait même le contraire puisque ce qui caractérise la tropopause, c'et une inversion de température.

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