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Les biais connus des modèles de prévisions


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Messages recommandés

Quels sont les biais connus des modèles de prévisions ?

 

Un biais n'est pas forcément une erreur constante (probablement même jamais) mais une imprécision ou une incertitude reproductible sur un paramètre donné sous certaines conditions plus ou moins générales ou plus ou moins strictes.

Les connaître améliore la lecture et l'analyse des modèles. Je souhaite que ceux-ci soient reportés sur ce topic et je mettrais éventuellement à jour ce premier message afin d'avoir une liste facilement accessible.

En voici quelques uns de référencés qui peuvent nous affecter dans nos régions européennes et donc françaises...

 

 

- Les situations d'inversion augmentent l'imprécision des T2m

 

Explications :

En effet, la couche concernée par l'inversion est généralement peu épaisse ce qui demande une analyse poussée et fine sur peu de niveaux verticaux (généralement quelques mètres à quelques dizaines de mètres, à comparer avec l'échelle convective, en km).
De fait, l'interpolation des T est sensible lors de ces conditions fines.
Ce biais peut s'observer aussi sur les T dans toute l'épaisseur de l'inversion et immédiatement au-dessus (RS simulé, météogramme). Une des causes est que le gradient thermique est inversé (la T augmente avec l'altitude) ce qui affecte les constantes prédéfinies dans les algorithmes d'évolution verticale de la T, cette imprécision augmentant en fonction de la sous-représentation des niveaux verticaux du modèle dans la couche soumise à inversion.


Par exemple, IFS modélise les T à son plus bas niveau natif (10 m) et extrapole ensuite à 2 m via une série d'algorithme prenant notamment en compte les paramètres du sol (nature, T et RH notamment), la turbulence à 10 m, le niveau des radiations entrantes et sortantes, etc. Si la T10m est une sortie directe du modèle, ce n'est pas le cas pour la T2m.
Il semblerait que GFS suive le même processus alors que GEM reposerait sur un niveau natif à 2 m. Il faudra que je me penche sur ce sujet plus précisément un jour ou l'autre, ECMWF s'est exprimé clairement là-dessus alors que je n'avais trouvé que des publications indirectes du CMC.

Des infos du côté d'ARPEGE et AROME ?

 

À noter que les nouvelles normes des RS à haute-résolution pourraient corriger en partie ce biais en détaillant ces zones beaucoup plus finement lors de l'assimilation de données. Le DWD s'en servira aussi probablement dans une mise à jour future d'ICON.

 

 

- Les T2m sont souvent sous-estimées en ville

 

Explications :

Les îlots urbain et les dômes de chaleur concomitants sont souvent peu ou mal représentés dans les modèles (déjà pour des questions de résolution de grille mais pas seulement). Cela conduit généralement à sous-estimer les T2m en ville. La comparaison entre observations et prévisions des T2m, associée aux conditions météorologiques prévalant à ce moment, permettent d'estimer le biais de chaque modèle et d'apporter une correction.
Tous les centres météorologiques travaillent sur les environnements urbains pour les intégrer au schéma de terrain de leurs modèles respectifs.

 

 

- Les Tn peuvent être sous-évaluées sur les côtes ou en périphérie urbaine

 

Explications :

Le refroidissement radiatif nocturne (le sol réémet la nuit une partie de la chaleur accumulée durant la journée) est parfois mal appréhendé, probablement du, entre autres raisons, à la différence de résolution entre les données de flux et la résolution de calcul du modèle. Les Tn peuvent ainsi être mal évaluées lorsque la nature de la grille géographique en un point précis devient importante (cas typique d'un bord de mer ou d'un zone semi urbaine par exemple où la résolution géographique plus fine s'oppose à une résolution plus large de la grille des flux). Dit autrement, la finesse des deux grilles n'est pas la même et la grille la plus fine (celle géographique) reçoit les données de flux à une échelle plus grande.
L'augmentation de la puissance de calculs des clusters de supercalculateurs pourraient à terme permettre de niveler ces différences. Le NCEP s'y est déjà engagé.

 

 

Biais spécifiques à IFS :

 

Températures :

 

- T2m irréalistes

 

Explications :

Je ne l'ai jamais observé mais ECMWF prévient de T2m irréalistes possibles (écart > ~10°C) sur un pas de temps dues aux schémas d'échanges des flux de surface et aux algorithmes de post-traitement pour calculer la T2m depuis la T10m (cf plus haut).
Une correction partielle a été introduite lors de la mise à jour de juin dernier (46r1) sur la conductivité thermique des flux humides.

 

 

- T2m légèrement inférieures aux observations sur des zones où la végétation est hétérogène

 

Explications :

IFS surestime l'indice de surface foliaire (en gros la couverture végétale) en saison intermédiaire malgré l'introduction de données climatologiques.
Du coup, une plus grande surface végétale implique une évapotranspiration plus grande et donc un biais dans les flux de chaleur latente et sensible et, en cascade, sur la formation plus importante de nuages et la diminution du « chauffage solaire » qui en résulte.
On peut ainsi avoir des T modélisées inférieures à l'observation.

 

 

Précipitations :

 

- Les précipitations isolées qui se créent en mer et abordent une terre peuvent être très sous estimées sur une bande de largeur variable de la côte.

 

Explications :

Ce biais existe peut-être dans les autres modèles. En effet, les précipitations ne sont pas modélisées en un processus continue mais par pas de temps (1h pour IFS). Le changement de terrain mer > terre affecte le schéma des RR. Lorsque la pluie aborde la côte entre deux pas de temps, la PRATE peut être sous estimée de 10 mm ou plus (plus rarement sur estimée). Plus on s'éloigne des côtes (vers l'intérieur des terres), plus ce biais diminue jusqu'à disparaître. La distance jusqu'à sa disparition totale dépend fortement de la direction et de la vitesse du vent : un vent, sur la hauteur de chute des précipitations, dans le même axe que la direction du nuage augmentera cette distance, distance d'autant plus grande que le vent est fort.
En été, cette distance peut atteindre les 20 km. En hiver, elle peut atteindre les 100 km lors de chutes de neige.
Des améliorations ont été apportées lors de la mise à jour 43r3 il y a deux ans mais cette correction reste insuffisante.

 

De plus, en cas de RR convectives, la physique d'IFS ne prend pas en compte la dérive des RR par le vent, contrairement aux RR dynamiques (typiquement stratiformes mais pas seulement).

 

 

- Les pluies orographiques sont généralement sous-estimées

 

Explications :

Les pluies orographiques sont généralement sous-estimées du fait de la résolution de la grille géographique : la hauteur des reliefs est moindre que dans la réalité (effet de lissage). L'ensemble ayant une résolution plus large que le déterministe, ce biais est plus important sur les sorties de l'ensemble.

La comparaison observations - prévisions est utile pour repérer le delta suivant les synoptiques.

 

 

- Les pluies convectives extrêmes en un point prévis sont toujours sous évaluées

 

Explications :

Toujours pour des raisons de résolution, les pluies convectives extrêmes en un point prévis sont toujours sous évaluées. En revanche, le total sur la maille est généralement bon permettant d'anticiper un tel risque par comparaison des mailles voisines. Ce biais est probablement présent dans les autres modèles.
Pour ceux qui ont accès à l'ensemble des produits ECMWF : « Point rainfall »
Dans le même genre, IFS fournit les précipitations moyenne sur la maille considérée. En tant que moyenne, certains secteurs sous-maille seront sur évalués et d'autres sous-évalués. Ce n'est pas un biais mais c'est relatif à la représentativité de la réalité dans un modèle numérique. À paramétrage égal, une résolution plus fine apportera un résultat meilleur.

 

 

Vents :

 

- Les rafales extrêmes lors des orages peuvent être largement sous estimées

 

Explications :

Les rafales extrêmes lors des grains vigoureux, des MCS et de toutes structures convectives potentiellement aptes à les générer sont sous-évaluées. En cause : la résolution tridimensionnelle du modèle et les algorithmes incapables de considérer l'ensemble des cas de figures concernés par ce phénomène.
ECMWF indique que, lorsque l'analyse détecte des conditions favorables, des rafales supérieures au double des vitesses des rafales modélisées sont possibles.

 

 

- En montagne, le vent à 10m est parfois sous estimé

 

Explications :

Les valeurs du vent à 100m sont plus pertinentes pour estimer le vent à 10m.
Weather.us et d'autres sites proposent gratuitement ce paramètre (UV100m).

 

 

Stratosphère :

 

Écarts de températures et fuite excessive d'humidité via la tropopause vers la basse stratosphère sont des biais connus d'IFS. De même que les comportements de l'O3 et des ondes de gravité de grande amplitude. Enfin, SEA5 (modèle saisonnier) rompt le VP de façon incorrecte au printemps.

 

 

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Merci pour plein de détails que je ne connais pas.

 

Par contre, attention à la définition de biais qui même en météo a une définition de statisticien.

 

Le biais est le fait qu'un estimateur se trompe dans un sens privilégié.

Il ne suffit pas de grossir l'échantillon pour que les erreurs se compensent. Le biais est la partie qui ne se compense pas.

 

L'idée d'avoir un biais conditionnel à la situation météo est un biais conditionnel.

En effet, toute évaluation intelligente d'un modèle doit s'intéresser aux biais conditionnels et c'est bien ce que tu fais.

Modifié par Cotissois 31
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A noter que selon un modèle comme Arôme, au niveau des vents en situation convective, on assiste plus souvent à une surestimation qu'à l'inverse, tout comme Arpège à cette tendance à emballer le phasage dépressionnaire, avec des creux de poche  d'une vigueur digne d'un cyclone tropical, la célèbre arpegeade.

 

Il existe aussi de la littérature qui explique un biais au niveau de l'écoulement sur le plateau groenlandais, je ne sais pas ce qu'il en est encore à l'heure actuelle par contre sur ce sujet.

On a pu voir aussi des biais lié à des insuffisances concernant l'intégration de la glace de mer, là encore des progrès, si on continue à dézoomer on avait aussi un biais froid très important sur le continent antarctique par la modélisation du réseau MERRA.

 

C'était histoire d'en citer quelques autres.

Modifié par sebb
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La glace de mer reste en effet encore très problématique. L'amélioration de la qualité et de la fréquence des données satellites devrait permettre de corriger l'assimilation des données ; cette phase étant sujette à des erreurs et des manques fréquents. En outre, le CMC travaille beaucoup et implémente moult algorithmes et physiques pour la glace de mer.

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  • 2 weeks later...
Posté(e)
Touraine (37) et Plateau des Bornes (74) 950m

Merci pour cette présentation détaillée.

Certes en montagne, les inversions de température, les rafales et les précipitations convectives sont mal appréhendées par les modèles, dont IFS, mais il me semble que le biais principal concerne tout simplement la température. Les énormes écarts entre T2m observées et prévus localement sont dûs à la résolution du modèle (9km pour IFS) et à la très faible résolution du modèle orographique (ou géographique) intégré.

Ainsi toutes les prévisions automatiques des applications météo basées pour la plupart sur GFS sont fausses en montagne. GFS affiche la même température à Chamonix 1100m et au sommet du Mont-Blanc 4800m. C’est un peu mieux pour IFS, mais guère. AROME est le meilleur vue sa résolution. 

Seule solution, interpoler les valeurs de température en atmosphère libre, par exemple pour l’isotherme 0°C, la limite pluie-neige...

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  • 5 months later...

ECMWF a signalé un bug sur le calcul de la CIN en toute zone (il s'agit bien du calcul, pas de l'implémentation des schemas convectifs dans IFS). Celui-ci est déjà corrigé dans la version prochaine d'IFS (47r1) qui sortira normalement en juin ou juillet. Pour l'heure, ECMWF recommande d'ignorer totalement ce paramètre dans tous les produits où il apparaît dont les sites qui les proposent.

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