ol_bugs Posté(e) 2 juin 2004 Partager Posté(e) 2 juin 2004 Quand la Terre et ses nuages donnent à la Lune une face cendrée LE MONDE | 29.05.04 | 15h11 Léonard de Vinci fut sans doute le premier à analyser scientifiquement le phénomène, qu'il décrit dans son Codex Leicester, rédigé entre 1506 et 1510 : la Lune n'est pas seulement illuminée par le Soleil. Elle l'est aussi, bien plus faiblement, par la Terre, sur laquelle les rayons de l'astre du jour viennent se réfléchir. C'est la "Lune cendrée", dont la partie plongée dans l'ombre reste cependant visible des Terriens. La mesure de ce clair de Terre sur la Lune fut systématisée par André-Louis Danjon (1890-1967). Dans les années 1920, l'astronome français entama une série d'observations, grâce à un système de prisme et de diaphragme installé sur un télescope, qui lui permit de définir une échelle de luminosité portant son nom. Ces recherches trouvent aujourd'hui un prolongement inattendu en climatologie : la Lune tend en effet à la Terre un miroir de sa face éclairée qui donne de précieuses indications sur son albédo, c'est-à-dire sur sa capacité à réfléchir le rayonnement solaire. On considère que les océans sont à l'origine de 10 % seulement de la réflectance de la planète, tandis que les terres émergées comptent pour 10 à 25 %, alors que les nuages renvoient dans le cosmos 50 % du rayonnement. Il ne s'agit là que d'estimations grossières, et les satellites d'observation ont pour mission d'affiner ces mesures (Le Monde du 17 mai). Mais le clair de Terre est un indice supplémentaire. "Plus la Terre est nuageuse, plus brillant est le clair de Terre. Or la modification de la couverture nuageuse est un important élément lors d'un changement climatique", résume Steven Koonin (Caltech, Pasadena), qui a proposé il y a une quinzaine d'années de combiner observation par satellite et mesure du clair de Terre pour surveiller l'évolution du climat. Cette dernière méthode a, de plus, le grand avantage de ne réclamer pour les observations qu'un modeste télescope et un détecteur électronique relativement simple. Avec ses collègues de l'observatoire solaire de Big Bear, en Californie, Steven Koonin présente dans la revue Science du 28 mai les résultats d'une vingtaine d'années d'observations. Les chercheurs ne connaissent avec précision le clair de Terre que depuis 1994, mais, en comparant leurs données avec les observations directes de la couverture nuageuse par satellite, ils ont pu reconstituer l'évolution de la réflectance de la Terre sur une plus longue période. PERPLEXES Les données obtenues les laissent cependant perplexes : l'albédo moyen annuel de la Terre a diminué graduellement entre 1985 et 1995, avant de subir une chute brutale en 1995 et 1996. Entre 1997 et 2001, le faible albédo a augmenté le réchauffement solaire du globe d'un niveau plus de deux fois plus élevé que celui qui serait engendré par un doublement du taux de gaz carbonique dans l'atmosphère ! Puis, entre 2001 et 2003, l'albédo a augmenté pour rejoindre les valeurs d'avant 1995. Cette brillance de la Terre est très probablement attribuable à une augmentation de la couverture nuageuse et de son épaisseur, estiment les chercheurs. Mais l'albédo n'est que l'un des rouages de la machine climatique. L'équipe américaine se garde donc bien de tirer des conclusions, estimant que la variabilité naturelle pourrait expliquer ces irrégularités. "Ces nouvelles données montrent qu'il faut étudier les nuages de façon détaillée, indique Enrique Pallé, l'un des signataires de l'article. Elles illustrent le fait que nous ne comprenons pas suffisamment notre système climatique pour pouvoir modéliser ses futurs changements avec précision." L'équipe américaine souhaite poursuivre ses observations tout au long d'un cycle solaire - onze ans - afin de voir si, comme certains en font l'hypothèse, l'activité du Soleil influence le climat. Elle compte aussi sur l'apport de mesures effectuées depuis l'Ukraine et la Chine, et espère déployer un réseau de huit télescopes capables de faire des mesures automatiques afin de s'affranchir de conditions météorologiques parfois défavorables localement. Hervé Morin • ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 30.05.04 Lien à poster Partager sur d’autres sites More sharing options...
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