Ventdautan Posté(e) 28 juillet Toulouse (quartier Lardenne) Partager Posté(e) 28 juillet (modifié) On entend souvent que si les sols sont très humides, ça va très fortement limiter la Tx à cause de l'évaporation nette de l'eau présente dans les sols. Dans la réalité, c'est plus complexe et l'impact de la limitation des T à cause de l'évaporation de l'eau dans les sols va dépendre de plusieurs facteurs. Petit rappel : l'évaporation est une transformation endothermique, qui absorbe de l'énergie. Il faut apporter 2454 kJ à 1 kg d'eau à 20°C pour passer ce kg d'eau de la phase liquide à la phase vapeur. En comparaison, il faut apporter 419 kJ pour chauffer ce même kg d'eau pour la passer de 0 à 100 °C. Donc faire évaporer 1 kg d'eau à 20°C équivaut à faire passer plus de 5kg d'eau de 0°C à 100°C. Donc l'énergie nécessaire pour évaporer l'eau dans les sols est énorme. Donc toute l'énergie utilisée pour évaporer ne sera donc pas utilisée pour chauffer les sols. L'évaporation nette d'un sol dépend de la température (et donc de l'ensoleillement) mais aussi de l'humidité de l'air, de l'humidité des sols et du vent. 1) Tout d'abord, l'évaporation d'un sol dépend de la température. Donc plus la température est élevée, plus l'évaporation va être importante. Donc si les sols sont bien humides, la limitation de la T par l'évaporation est d'autant plus important avec les températures élevées. 2) L'évaporation d'un sol dépend aussi du vent. Plus le vent est fort et turbulent, plus l'évaporation nette sera importante. Donc les températures vont être plus limitées via l'évaporation des sols si le vent est fort. A noter aussi qu'un vent fort va limiter la hausse des températures en journée et la baisse des températures durant la nuit via le brassage turbulent que le vent génère, ce qui a tendance à homogénéiser la couche limite et donc à limiter les gradients verticaux. Sans advection, je rappelle que c'est le sol qui se réchauffe la journée (en absorbant le rayonnement solaire) et qui se refroidit la nuit (via le rayonnement infrarouge). Et ce réchauffement/refroidissement des sols se propage à la base de l'atmosphère via la conduction et la turbulence (d'origine thermique et/ou dynamique (via le cisaillement vertical de vent)). 3) L'évaporation d'un sol dépend aussi de l'humidité de l'air. Plus l'air est humide, plus l'évaporation va être faible. L'évaporation est directement proportionnelle au déficit de vapeur d'eau de l'atmosphère par rapport à la saturation. Donc si les sols sont bien humides, la limitation de la température par l'évaporation de l'eau du sol va donc être bien plus importante si l'air est sec que si l'air est humide. 4) Evidemment, l'évaporation (on parle de flux de chaleur latente) de l'eau d'un sol est bien plus important au-dessus d'un sol humide qu'au-dessus d'un sol sec. Car au-dessus d'un sol sec, il y a moins d'eau potentielle à évaporer et elle est plus difficile à aller "chercher" dans les interstices entre les grains de terre. Donc lors d'un épisode de chaleur, la température sera d'autant plus limitée, si les sols sont humides, s'il y a du vent ET si l'air est bien sec. Par contre, la température va être que faiblement voir pas du tout limitée si les sols sont secs, s'il y a peu ou pas de vent ET si l'air est bien humide. Pour finir, un beau petit exemple avec les 2 stations toulousaines, exemple pas parfait mais qui indique assez bien l'effet d'un sol humide par rapport à un sol plus sec ainsi que l'effet d'un air plus sec par rapport à un air plus humide. En moyenne, les Tx sont les mêmes ou très légèrement plus élevées à Francazal (0,1 ou 0,2°C d'écart comme aujourd'hui) mais ça dépend évidemment de la direction du vent. Il y avait eu un très gros orage qui était passé sur Toulouse-Francazal (37 mm) et avait frôlé Toulouse-Blagnac (5 mm) le 19 juin 2019. Donc le sol était bien plus humide à Francazal qu'à Blagnac, même encore 8 jours plus tard. Le 27 juin 2019, une grosse chaleur plutôt sèche est arrivée sur le sud donc l'évaporation de l'eau dans les sols va être important. L'impact de la différence d'humidité des sols entre les 2 stations est immédiat. On a relevé 40,2°C de Tx à Blagnac contre 38,3°C à Francazal. Quasiment 2°C d'écart, différence principalement dû à l'écart d'humidité des sols. Le 29 juin 2019, rebelote mais l'air est bien plus humide donc l'effet du sol humide de Francazal (qui s'est quand même un peu asséché) est bien moins important : 40°C à Blagnac contre 39,2°C à Francazal. Donc plus que 0,8°C d'écart. Donc j'espère que cette petite explication permet de moduler la fameuse phrase : les sols sont humides donc la température ne pourra pas monter bien haut. Modifié 4 août par Ventdautan 1 9 1 Lien à poster Partager sur d’autres sites More sharing options...
Idéfix37 Posté(e) 29 juillet Touraine (37) et Plateau des Bornes (74) 950m Partager Posté(e) 29 juillet (modifié) Analyse intéressante mais qui n’est appliquée qu’au cas de sols nus et qui ne prend en considération que l’évaporation par le sol. Sous nos climats il y a le plus souvent de la végétation sur ces sols. Or cette végétation transpire et le bilan global doit être fait au niveau de l’évaporation + la transpiration (évapotranspiration). C’est à dire que même si les premiers horizons (couches) sont secs l’évaporation sera très limitée, mais la végétation bien implantée ira chercher l’eau en profondeur. Bien sûr l’importance de la transpiration déprendra du développement de la végétation et de l’enracinement, de la nature du sol (capacité à retenir de l’eau en profondeur). “Donc lors d'un épisode de chaleur, la température sera d'autant plus limitée si les sols sont humides, … “ ou s’ils sont couverts par une végétation abondante et dont le métabolisme n’est pas limité. Modifié 29 juillet par Idéfix37 4 Lien à poster Partager sur d’autres sites More sharing options...
Ventdautan Posté(e) 29 juillet Toulouse (quartier Lardenne) Auteur Partager Posté(e) 29 juillet (modifié) il y a 31 minutes, Idéfix37 a dit : Analyse intéressante mais qui n’est appliquée qu’au cas de sols nus et qui ne prend en considération que l’évaporation par le sol. Sous nos climats il y a le plus souvent de la végétation sur ces sols. Or cette végétation transpire et le bilan global doit être fait au niveau de l’évaporation + la transpiration (évapotranspiration). C’est à dire que même si les premiers horizons (couches) sont secs l’évaporation sera très limitée, mais la végétation bien implantée ira chercher l’eau en profondeur. Bien sûr l’importance de la transpiration déprendra du développement de la végétation et de l’enracinement, de la nature du sol (capacité à retenir de l’eau en profondeur). “Donc lors d'un épisode de chaleur, la température sera d'autant plus limitée si les sols sont humides, … “ ou s’ils sont couverts par une végétation abondante et dont le métabolisme n’est pas limité. Oui, en effet, mon analyse était pour le cas d'un sol nu donc surtout applicable sur des champs nus (après récolte) ou des sols comme mon avatar 😂 mais pas du tout applicable au niveau des forêts ou autres. C'était surtout pour remettre avant tout quelques bases physiques sur l'évaporation. Et c'est pour cela que je n'ai parlé que d'évaporation et pas d'évapotranspiration. Rajouter la végétation complexifie grandement l'analyse. Et comme tu l'as dit, je n'ai pas parlé de la nature du sol qui module aussi l'analyse même sans végétation. Un sol très drainant ne retient pas l'eau et donc l'évaporation restera quand même bien limitée même après une période humide. D'ailleurs, c'est pour cela qu'il y a de la modélisation, pour essayer de prendre en compte le mieux possible tous ces processus. ^^ Modifié 29 juillet par Ventdautan 4 Lien à poster Partager sur d’autres sites More sharing options...
Matpo Posté(e) 29 juillet Toulouse, fontaines/Bayonne, en plein ICU, bien trop loin de la neige de mes montagnes tarnaises et cevenoles Partager Posté(e) 29 juillet Il y a 9 heures, Ventdautan a dit : Oui, en effet, mon analyse était pour le cas d'un sol nu donc surtout applicable sur des champs nus (après récolte) ou des sols comme mon avatar 😂 mais pas du tout applicable au niveau des forêts ou autres. C'était surtout pour remettre avant tout quelques bases physiques sur l'évaporation. Et c'est pour cela que je n'ai parlé que d'évaporation et pas d'évapotranspiration. Rajouter la végétation complexifie grandement l'analyse. Et comme tu l'as dit, je n'ai pas parlé de la nature du sol qui module aussi l'analyse même sans végétation. Un sol très drainant ne retient pas l'eau et donc l'évaporation restera quand même bien limitée même après une période humide. D'ailleurs, c'est pour cela qu'il y a de la modélisation, pour essayer de prendre en compte le mieux possible tous ces processus. ^^ Merci @Ventdautan pour ce topo ! On peut aussi parler de la limitation des Tx par la proximité des lacs 🤪 je le dis sur le ton de l humour mais il y a quelques années on p avait ici même suggéré pour trouver un climat pas trop froid l hiver et pas trop chaud l été de chercher l effet tampon d un lac Et les limitations par proximité côtière bref ! Que de complexité c est fascinant Et donc @Idéfix37 mais je pense que tu avais déjà cela à l esprit, les techniques de culture à grande échelles influent sur les t max d une région/pays 1 Lien à poster Partager sur d’autres sites More sharing options...
Cers Posté(e) 4 août Partager Posté(e) 4 août (modifié) On 7/28/2024 at 5:05 PM, Ventdautan said: Il faut apporter 2454 J à 1 kg d'eau à 20°C pour passer ce kg d'eau de la phase liquide à la phase vapeur. En comparaison, il faut apporter 419 J pour chauffer ce même kg d'eau pour la passer de 0 à 100 °C. Donc faire évaporer 1 kg d'eau à 20°C équivaut à faire passer plus de 5kg d'eau de 0°C à 100°C. Donc l'énergie nécessaire pour évaporer l'eau dans les sols est énorme. Donc toute l'énergie utilisée pour évaporer ne sera donc pas utilisée pour chauffer les sols. Salut, merci pour le post. Il y a un petit problème d'unités. La chaleur latente de vaporisation de l'eau est de ~ 2400 kJ/kg, et la chaleur massique de l'eau liquide est de ~ 4190 J/kg/K ou 4,19 kJ/kg/K. Donc il faut apporter 2400 kJ pour évaporer 1 kg d'eau (ou 2400 J pour évaporer 1 g d'eau). En comparaison, l'élévation de 1 °C d'un kg d'eau requiert un apport d'énergie de 4,19 kJ. Par conséquent, l'énergie pour évaporer 1 kg d'eau correspond à plus de 5 fois l'énergie à fournir pour chauffer 1 kg d'eau de 0 à 100 °C. Modifié 4 août par Cers 1 Lien à poster Partager sur d’autres sites More sharing options...
Ventdautan Posté(e) 4 août Toulouse (quartier Lardenne) Auteur Partager Posté(e) 4 août (modifié) il y a 49 minutes, Cers a dit : Salut, merci pour le post. Il y a un petit problème d'unités. La chaleur latente de vaporisation de l'eau est de ~ 2400 kJ/kg, et la chaleur massique de l'eau liquide est de ~ 4190 J/kg/K ou 4,19 kJ/kg/K. Donc il faut apporter 2400 kJ pour évaporer 1 kg d'eau (ou 2400 J pour évaporer 1 g d'eau). En comparaison, l'élévation de 1 °C d'un kg d'eau requiert un apport d'énergie de 4,19 kJ. Par conséquent, l'énergie pour évaporer 1 kg d'eau correspond à plus de 5 fois l'énergie à fournir pour chauffer 1 kg d'eau de 0 à 100 °C. Exact, j'ai mis des J au lieu de kJ. 😱 Heureusement, ça ne change pas le raisonnement. Je viens donc de corriger cette erreur. Merci. 😉 Modifié 4 août par Ventdautan 1 Lien à poster Partager sur d’autres sites More sharing options...
Cers Posté(e) 4 août Partager Posté(e) 4 août 8 minutes ago, Ventdautan said: Exact, j'ai mis des J au lieu de kJ. 😱 Heureusement, ça ne change pas le raisonnement. Je viens donc de corriger cette erreur. Merci. 😉 Exact, le raisonnement ne change pas ! Lien à poster Partager sur d’autres sites More sharing options...
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