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Masses froides en déclin sur l'hémisphère


TreizeVents
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Bonjour,

Pour signalement, dans une étude parue il y a quelques jours dans la revue scientifique AMS, plusieurs chercheurs se sont intéressés à l'évolution des masses froides en hiver dans notre hémisphère ces dernières décennies. Le constat, on le devinait un peu à l'avance, mais il surprend tout de même par son ampleur : les masses froides sont de moins en moins denses et de moins étendues à l'échelle de l'hémisphère en hiver.

Voir l'abstract de l'article :

Employing reanalysis data sets, several threshold temperatures at 850 hPa are used to measure the wintertime (DJF) areal extent of the lower tropospheric, Northern Hemisphere cold air pool over the past 66 cold seasons. The analysis indicates a systematic contraction of the cold pool at each of the threshold temperatures. Special emphasis is placed on analysis of the trends in the extent of the -5°C air. Composite differences in lower tropospheric temperature, middle tropospheric geopotential height and tropopause-level jet anomalies between the 5 coldest and 5 warmest years are considered. Cold years are characterized by an equatorward expansion of the jet in the Pacific and Atlantic sectors of the hemisphere and by invigorated cold air production in high latitude Eurasia and North America. Systematic poleward encroachment of the -5°C isotherm in the exit regions of the storm tracks accounts for nearly 50% of the observed contraction of the hemispheric wintertime cold pool since 1948. It is suggested that this trend is linked to displacement of the storm tracks associated with global warming. Correlation analyses suggest that the interannual variability of the areal extent of the 850 hPa cold pool is unrelated to variations in hemispheric snow cover, the Arctic Oscillation, or the phase and intensity of ENSO. A modest statistical connection with the East Asian Winter Monsoon, however, does appear to exist. Importantly, there is no evidence that a resurgent trend in cold Northern Hemisphere winters is ongoing. In fact, the winter of 2013-14, though desperately cold in North America, was the warmest ever observed in the 66-year time series.
Malgré les épisodes hivernaux parfois intenses de ces derniers hivers aux latitudes moyennes (février 2015 sur l'est des Etats-Unis en est l'exemple même, mais on aurait pu citer décembre 2010 ou février 2012 chez nous), de manière générale les masses froides sont en déclin marqué. Si on regarde par exemple la surface couverte par une masse d'air inférieure à -5° à 850 hPa les deux derniers hivers, on se rend ainsi compte que cela devient presque un exploit d'avoir une valeur conforme à la moyenne climatologique des années passées : [align=center]post-2200-0-00605200-1425827405_thumb.png[/align]

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En janvier 2015, les masses froides avec -5° à 850 hPa se sont étendues en moyenne sur environ 65 millions de km², très loin de la normale qui avoisine 71 millions de km². Pas mieux en décembre, pas mieux en févier, et pas mieux l'année dernière. Et cela n'est que le reflet de la tendance générale : [align=center]post-2200-0-26723600-1425827709_thumb.png[/align]

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Les barres représentent les écarts de la surface couverte par les masses froides, la courbe grise étant celle des températures de surface de l'hémisphère (données Hadley). La tendance se passe de commentaires, et l'hiver qui vient de s'achever a largement battu le record précédent : dit autrement, l'air froid n'avait jamais été aussi peu étendu depuis le début des relevés. Un élément intéressant que l'on peut relever, c'est que cette tendance au déclin marqué de la surface couverte par les masses froides est en opposition avec le relatif refroidissement de notre hémisphère en hiver. On le voit sur le graphique posté ci-dessus : les anomalies de température en hiver (courbe grise) stagnent et même régressent depuis la fin des années 1990, alors qu'à deux exceptions près les masses froides n'ont jamais été aussi peu étendues. Pourtant, ce refroidissement des températures hivernales au sol est assez indéniable : [align=center]post-2200-0-02215400-1425826905_thumb.png[/align]

[align=center]Evolution des températures hivernales entre 1989 et 2011,[/align]

[align=center]Cohen et al, 2012[/align]

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[align=center] [/align]

C'est en essayant de creuser un peu sur ce point précis que je suis tombé sur une autre étude, sortie elle aussi il y a quelques jours, et qui a le mérite de mettre un sacré coup de pied dans la fourmilière :

The warming hiatus shows a strong seasonal and geographical asymmetry, with cooling in the Northern Hemisphere winter, especially over land, and warming elsewhere and in the other seasons. We show that the characteristics of the Northern Hemisphere winter cooling in 1998-2012 can mostly be explained by missing observations and by internal variability in the atmospheric circulation of the Northern Hemisphere extratropics. Estimates of the annual and seasonal temperature trends in 1998-2012 obtained by considering the concurrent effects of unforced natural variability and of coverage bias are much closer to the corresponding long-term trends. Reanalyses suggest that the coverage bias was exceptionally pronounced during recent years and that an area of strong warming was missed due to the incomplete observational coverage. CMIP5 climate models indicate that trends in atmospheric circulation during the hiatus period did not occur as a response to anthropogenic forcing.
En résumé, le refroidissement hivernal de notre hémisphère serait expliqué par la variabilité interne, mais surtout par une mauvaise couverture des observations climatiques. D'après cette étude, cette mauvaise couverture aurait conduit à un biais froid "exceptionnellement prononcé" ces dernières années, car il a conduit à passer à côté du très fort réchauffement qui aurait concerné des régions peu fournies en relevés (on peut supposer, essentiellement dans le grand nord). Et que ce refroidissement serait par conséquent très largement surestimé.

1.PNG.2b8e16ecb15f8498465074a3eb0ed27f.P

2.PNG.b62306c9172be6c557e4d855ecac94c0.P

3.png.23223d922c96c9ceaaa7958b1aec7990.p

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Invité Sky Blue

Tout à fait en accord avec cette étude qui montre que le Jet yoyote aussi de la cafetière.(perte de gradient de T° entre les différentes latitudes par amplification arctique)

http://iopscience.iop.org/1748-9326/10/1/014005/pdf/1748-9326_10_1_014005.pdf

D'après cette étude, cette mauvaise couverture aurait conduit à un biais froid "exceptionnellement prononcé" ces dernières années, car il a conduit à passer à côté du très fort réchauffement qui aurait concerné des régions peu fournies en relevés (on peut supposer, essentiellement dans le grand nord). Et que ce refroidissement serait par conséquent très largement surestimé.

Aie, tu va ébranler des certitudes sur le sujet mon cher 13V.whistling.gif

Il faudra faire avec, mais j'avoue que ce n'est pas une surprise.

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Aie, tu va ébranler des certitudes sur le sujet mon cher 13V.whistling.gif

Ce n'est pas non plus le grand chamboulement des connaissances précédentes. Le fait que l'on ait eu ces dernières années (et que l'on ait encore) une récurrence assez nette d'épisodes très hivernaux aux latitudes moyennes, au point que les tendances de température hivernale se sont inversées depuis bien 15 ans, est quelque chose d'indéniable. Après bien sûr on peut discuter sur la significativité ou non de cette tendance, Tamino l'a très bien fait pour les Etats-Unis sur son blog en réponse à l'étude de Cohen. Il a ainsi montré au final que ce refroidissement n'était pas statistiquement pas significatif outre Atlantique, mais en raisonnant à l'envers on peut quand même noter que l'hiver est la seule saison la bas à ne pas se réchauffer significativement, ce qui est quand même parlant.

De l'autre côté, le fait que la couverture des observations ne soit pas optimale et que cela induise un biais froid dans notre hémisphère par une mauvaise prise en compte des hautes latitudes, n'est pas non plus quelque chose que l'on découvre tout juste. Entre autres éléments, on peut citer sur ce point les résultats de Cowtan and Way qui semblaient déjà indiquer lors de leur parution une sous-estimation du réchauffement dans les régions arctiques particulièrement en hiver.

Au final, à mon sens on enfonce un clou qui était déjà un peu planté sur ce point.

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Invité Sky Blue

Pour nous il était planté depuis longtemps pour d'autres moins.wink.png

Un rappel antitétanique s'impose dans ce cas.laugh.png

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Posté(e)
Malbosc, piémont cévenol du 07 en limite du 30 (alt. 226m), le long du ruisseau de Maubert, affluent de la Ganière

Est-ce que ce "biais froid" pourrait en partie être expliqué par (mais ce fait est-il avéré ?) une augmentation du nombre et de la durée des anticyclones hivernaux, induisant sur certaines zones un accroissement du froid d'inversion ?

Il faudrait évidemment faire une corrélation, dans ce cas, avec les pressions dominantes sur chaque hiver ; et je suis bien conscient aussi du fait que ça ne vaut pas vraiment pour les zones polaires où le froid au sol est plus puissant sous un vortex dynamique, que le contraire. Peut-être que ça pourrait valoir pour des zones où il fait plus froid quand il y a inversion que quand il y a flux dynamique alimenté en air froid d'altitude ? (J'en conviens, ça limite l'hypothèse aux zones souvent maritimisées).

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Posté(e)
Tourrette-Levens (06) 420m

En résumé, le refroidissement hivernal de notre hémisphère serait expliqué par la variabilité interne, mais surtout par une mauvaise couverture des observations climatiques. D'après cette étude, cette mauvaise couverture aurait conduit à un biais froid "exceptionnellement prononcé" ces dernières années, car il a conduit à passer à côté du très fort réchauffement qui aurait concerné des régions peu fournies en relevés (on peut supposer, essentiellement dans le grand nord). Et que ce refroidissement serait par conséquent très largement surestimé.
Je ne suis pas totalement d'accord pour la variabilité interne. Il y a surtout un rapport de cause à effet.

Ce qui entretient le VP c'est le froid présent sur le pôle qui, par interaction avec les masses d'air subtropicales, forment une dynamique créant dépressions et tempêtes au niveau de la limite barocline. Lorsqu'elles se comblent, nombre de ces dépressions sont rejetées dans l'air froid vers le nord et finissent par induire une rotation cyclonique à la masse d'air polaire. Le VP est né!

Maintenant voilà deux conditions qui se posent:

Faible augmentation de la température des masses d'air tropicales.

Forte augmentation des températures de la masse d'air polaire.

Le problème c'est que moins de gradient donne moins de dynamique donc moins de force au VP à la saison froide. Ceci peut donc expliquer la tendance à la remontée vers le nord de l'influence de la ceinture anticyclonique subtropicale (elle "déborde" plus facilement sur les parallèles autour du 45ème).

Qui dit remontées de HP et faiblesse du VP (voire VP éclaté) dit coulées froides.

Maintenant, vient l'effet de vase communicants:

On pourrait se dire que le froid qui coule d'un côté fait remonter de l'air doux de l'autre. Sauf que si le flux n'est pas assez dynamique (et la faiblesse du VP tend à donner un flux mou dans plus de situations de courants méridiens), la masse d'air tend à se refroidir notamment au dessus des terres (nuit longue, voire nuit polaire) malgré son origine. Il y a donc induction d'un biais froid.

On se retrouve avec des descentes froides plus nombreuses aux latitudes tempérées sans pour autant que l'air d'origine tropicale soit beaucoup plus chaud. Au final, les hivers des régions tempérées tendent à être plus froids malgré un réchauffement massif aux pôles.

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Je ne suis pas totalement d'accord pour la variabilité interne. Il y a surtout un rapport de cause à effet.

Ce qui entretient le VP c'est le froid présent sur le pôle qui, par interaction avec les masses d'air subtropicales, forment une dynamique créant dépressions et tempêtes au niveau de la limite barocline. Lorsqu'elles se comblent, nombre de ces dépressions sont rejetées dans l'air froid vers le nord et finissent par induire une rotation cyclonique à la masse d'air polaire. Le VP est né!

Maintenant voilà deux conditions qui se posent:

Faible augmentation de la température des masses d'air tropicales.

Forte augmentation des températures de la masse d'air polaire.

Le problème c'est que moins de gradient donne moins de dynamique donc moins de force au VP à la saison froide. Ceci peut donc expliquer la tendance à la remontée vers le nord de l'influence de la ceinture anticyclonique subtropicale (elle "déborde" plus facilement sur les parallèles autour du 45ème).

Qui dit remontées de HP et faiblesse du VP (voire VP éclaté) dit coulées froides.

Maintenant, vient l'effet de vase communicants:

On pourrait se dire que le froid qui coule d'un côté fait remonter de l'air doux de l'autre. Sauf que si le flux n'est pas assez dynamique (et la faiblesse du VP tend à donner un flux mou dans plus de situations de courants méridiens), la masse d'air tend à se refroidir notamment au dessus des terres (nuit longue, voire nuit polaire) malgré son origine. Il y a donc induction d'un biais froid.

On se retrouve avec des descentes froides plus nombreuses aux latitudes tempérées sans pour autant que l'air d'origine tropicale soit beaucoup plus chaud. Au final, les hivers des régions tempérées tendent à être plus froids malgré un réchauffement massif aux pôles.

Oui enfin il ne faut pas exagérer le refroidissement des hivers dans l Hémisphère nord. La période étudiée depuis 1989 est trop courte. Si l on compare des périodes trentenaires on deduira plutôt un radoucissemnt. Le cas de la France même si il est trop restreint va bien dans ce sens
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Le problème c'est que moins de gradient donne moins de dynamique donc moins de force au VP à la saison froide. Ceci peut donc expliquer la tendance à la remontée vers le nord de l'influence de la ceinture anticyclonique subtropicale (elle "déborde" plus facilement sur les parallèles autour du 45ème).

Qui dit remontées de HP et faiblesse du VP (voire VP éclaté) dit coulées froides.

Maintenant, vient l'effet de vase communicants:

On pourrait se dire que le froid qui coule d'un côté fait remonter de l'air doux de l'autre. Sauf que si le flux n'est pas assez dynamique (et la faiblesse du VP tend à donner un flux mou dans plus de situations de courants méridiens), la masse d'air tend à se refroidir notamment au dessus des terres (nuit longue, voire nuit polaire) malgré son origine. Il y a donc induction d'un biais froid. On se retrouve avec des descentes froides plus nombreuses aux latitudes tempérées sans pour autant que l'air d'origine tropicale soit beaucoup plus chaud. Au final, les hivers des régions tempérées tendent à être plus froids malgré un réchauffement massif aux pôles.

Tu donnes ici le schéma général en effet, mais il y a quand même bien une variabilité interne dans le sens où d'une année sur l'autre, le vortex polaire peut se montrer plus ou moins dense, avec du coup plus ou moins d'échanges avec les terres des latitudes moyennes. Si on considère par exemple la comparaison entre l'indice AO et les terres située en Eurasie au dessus de 30° nord sur le duo janvier / février (la relation est moins nette en décembre), la relation entre les deux est évidente :

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Partant de là, on peut deviner que la tendance négative très nette de l'AO depuis le pic du début des années 1990 joue un rôle très important dans la tendance des températures hivernales des terres - c'est pour cela que c'est un peu aussi d'un certain sens la "variabilité naturelle" qui a joué. Maintenant, cela n'empêche pas que ces conditions AO- de plus en plus récurrentes soient très possiblement liées, d'une manière plus ou moins nette, aux mécanismes que tu décris. Auquel cas c'est en effet un peu le serpent qui se mord la queue (rétroaction négative).

Cela étant, ce constat ne remet pas en cause le postulat de l'étude citée ici, personne n'ayant réfuté le refroidissement hivernal des terres des latitudes moyennes de l'hémisphère (dans son constat comme dans ses mécanismes). Ce qui est mis en avant, c'est une possible sous estimation du réchauffement dans d'autres régions de l'hémisphère sur la même période dans les régions peu couvertes en données climatologiques - ce qui peut mathématiquement jouer au final sur la moyenne de l'hémisphère.

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[align=center]Evolution des températures hivernales entre 1989 et 2011,[/align]

[align=center]Cohen et al, 2012[/align]

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Je ne comprend pas trop cette carte :

La France y apparait déficitaire, alors que les températures hivernales sont restées strictement identiques entre 91/00 et 01/10 ; elles ont pour l'instant augmenté de 0.2°C sur les 5 derniers hivers de 2011 à 2015 par rapport à la décennie précédente...

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