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Bioclimats, phytogéographie et changements climatiques


dann17
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Saint-Ambroise, Saguenay-Lac-St-Jean, QC, Canada

Bonjour à tous,

 

Dans un contexte global de changements climatiques désormais irréfutables et inéluctables, et alerté par le début très hâtif d'une sécheresse qui point déjà le bout de son nez sur une grande partie de la France, je me suis dit qu'il fallait que je sorte certains indices bioclimatiques de leur boîte. 

Je vous présente ici une carte (pour le moment, celle de la France) de l'indice hydrique estival « Ihe » calculé à partir des données climatiques de la période 1980-2010, voire 1970-2010, et tenant compte des paramètres de température, précipitations (quantités et nombre de jours), d'humidité relative, de vent, de latitude et d'ensoleillement moyens. Cet indice étant valable pour la période estivale (càd de juin à août inclus, pour l'hémisphère nord).

Une valeur de 0 correspond à la limite de la sécheresse dite écologique : ce seuil est l'un de ceux qui délimitent le climat méditerranéen. Autrement dit, il ne suffit pas que l'indice Ihe soit < 0 pour que le climat soit nécessairement méditerranéen. En revanche, une valeur supérieure à 0 exclut toute possibilité d'un climat de ce type.

Une valeur > 30 signifie que les étés sont généralement très humides, au point que même les sécheresses superficielles (herbes et gazons jaunis) y sont rares.

Une valeur < -30 signifie que la sécheresse estivale est très intense.

 

0zc3.jpg

 

Vous pouvez constater qu'une partie du littoral atlantique français (de l'île d'Oléron à la presqu'île de Quiberon, en passant par les Sables d'Olonne, Noirmoutier et Pornic) présente des valeurs très proches de 0, voire inférieures.

Il faut comprendre que la sécheresse écologique estivale (donc celle des sols en lien avec la possibilité de l'établissement de peuplements forestiers xérophiles ou non) est climatiquement aussi intense à Noirmoutier qu'à Carcassonne ou qu'à Aubenas.

Cela signifie qu'une petite partie des peuplements forestiers dans ces localités de la façade atlantique doit être de nature xérophile. Or il existe une espèce xérophile présente là-bas : Quercus Ilex, dit le chêne vert.

 

Regardons justement la répartition de cette espèce : une étude publiée en 2013 parle de l'évolution envisagée des aires de répartition du chêne vert dans l'ouest de la France (zone la plus nordique pour cette espèce).

https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0080443

 

On constate que les zones concernées par des peuplements de chênes verts sont justement les environs de Noirmoutier, des Sables d'Olonne et de Hourtin. Au passage, ils ont oublié l'île d'Oléron qui, je le sais, est peuplée de nombreux chênes verts.

La zone de Hourtin possède un incide Ihe légèrement supérieur (environ 3 ou 4), mais le sol sablonneux assèche en quelque sorte les conditions bioclimatiques.

D'une manière générale, il est possible de trouver des peuplements de chênes verts si l'indice Ihe avoisine les +10. Mais ces peuplements se trouvent là où les conditions édaphiques (et de relief) sont favorables (pentes rocailleuses, etc.).

 

journal.pone.0080443.g002

Il serait intéressant de vérifier si, avec le réchauffement climatique prévu, la zone bleue (sur la carte ci-dessus) sera vraiment aussi étendue que cela.

 

 

Modifié par dann17
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Posté(e)
Saint-André-Allas (225 m) à 5 km à l'ouest de Sarlat (Périgord Noir), Condat-sur-Vézère (88 m) pour le travail

Merci pour ton travail toujours pointu :) 

 

En effet le chêne vert est quand même bien dépendant des conditions édaphiques.

Il est très présent en Périgord Noir et Quercy sur toutes les pentes rocailleuses bien exposées et c'est d'ailleurs la seule espèce qui pousse en s'accrochant aux falaises. Sa répartition est très visible l'hiver quand les autres espèces caduques ont perdu leur feuillage (essentiellement des chênes pubescents sur les sommets de collines et sur les pentes plus ombragées et "fraîches").

Et là c'est bien grâce aux sols calcaires très drainants qu'il s'épanouit, car les étés sont quand même correctement arrosés (si on fait abstraction de la plupart des étés de la période récente évidemment).

Il est d'ailleurs la principale espèce utilisée en arbre truffier :) 

 

Pour revenir au sujet global, as-tu déjà des observations dans l'époque récente de la "migration" (naturelle j'entends) de certaines espèces végétales ?

Modifié par acrid vintaquatre
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Posté(e)
Aubenas en Ardèche méridionale

C'est vrai que le chêne-vert est très bon indicateur des conditions climatiques. sur mon secteur (piémont de l'Ardèche cévenole) il s'arrête exactement là où commencent les forts cumuls de pluie, à la limite entre les zones de faible altitude où les étés sont secs et les zones plus montagneuses où les étés connaissent régulièrement des orages. 

cette même frontière marque très souvent la limite pluie-neige en hiver.

le chêne-vert couvre les collines trop sèche pour le châtaignier. 

plus en altitude, il demeure sur les adrets rocailleux mais disparait des autres emplacements pour céder la place au châtaignier et au pin Laricio.

il est aussi notable que dans le bas-Vivarais (la basse Ardèche calcaire) sur terrain plat il cède souvent la place au chêne pubescent. on ne le retrouve que sur les plateaux calcaires les plus méridionaux et les plus drainants. 

 

il y a une heure, acrid vintaquatre a dit :

Pour revenir au sujet global, as-tu déjà des observations dans l'époque récente de la "migration" (naturelle j'entends) de certaines espèces végétales ?

 

en Ardèche, il est visible que le chêne-vert élargit son aire naturelle en poussant toujours plus haut en altitude. des versants sud, encore couverts de merisiers, châtaigniers, prunelliers il y a 10 ans, sont aujourd'hui colonisés par de jeunes chênes-verts tandis que les fruitiers sont à l'agonie voire déjà morts (sécheresse/canicule historique de 2019...) 

on observe la même chose avec le pin maritime, extrêmement invasif depuis le 19eme siècle (bois de mine)

le chênes kermès, plutôt rare à l'origine, commence à devenir de plus en plus commun sur les adrets, mêlé au chêne-vert. intéressant car chez nous il est vraiment à la limite nord de sont aire de répartition traditionnelle.   

il semble aussi que dans le bas-Vivarais, le pin d'Alep se fait plus présent. 

ici nous sommes bien placé pour observer la remontée des conditions climatiques méditerranéennes et de la flore qui va avec puisque nous sommes à l'extrême limite de la zone méd. avec déjà, à la base, des étés chauds et secs (comme on le voit bien sur la carte de @dann17)

ces dernières années on vu de véritables conditions méd. qui ont mis à mal très rapidement de nombreuses espéces euro-atlantiques.

pour faire court, on supprime les vergers de pommiers et cerisiers pour planter de l'olivier...

ce que j'ai fait sur mon propre terrain.

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Posté(e)
Saint-Ambroise, Saguenay-Lac-St-Jean, QC, Canada
Il y a 22 heures, acrid vintaquatre a dit :

Merci pour ton travail toujours pointu :) 

 

En effet le chêne vert est quand même bien dépendant des conditions édaphiques.

Il est très présent en Périgord Noir et Quercy sur toutes les pentes rocailleuses bien exposées et c'est d'ailleurs la seule espèce qui pousse en s'accrochant aux falaises. Sa répartition est très visible l'hiver quand les autres espèces caduques ont perdu leur feuillage (essentiellement des chênes pubescents sur les sommets de collines et sur les pentes plus ombragées et "fraîches").

Et là c'est bien grâce aux sols calcaires très drainants qu'il s'épanouit, car les étés sont quand même correctement arrosés (si on fait abstraction de la plupart des étés de la période récente évidemment).

Il est d'ailleurs la principale espèce utilisée en arbre truffier :) 

 

Pour revenir au sujet global, as-tu déjà des observations dans l'époque récente de la "migration" (naturelle j'entends) de certaines espèces végétales ?

Mais de rien !

Et merci à toi pour ces précisions sur la présence du chêne vert dans ta région. J'ai calculé l'indice Ihe pour Sarlat, il vaut +15. Ici, les étés sont donc (oui, je fais moi aussi abstraction des tout derniers) plutôt humides malgré tout. Et, en effet, pour que des chênes verts parviennent à pousser dans la région, il leur faut comme tu l'as dit des conditions bien spécifiques pour pousser là où d'autres espèces n'ont pas suffisamment de ressources en eau notamment.

Je ne savais que ce chêne était un arbre truffier. Intéressant !

Pour répondre à ta question, tu peux déjà avoir un aperçu en lisant l'article que j'ai posté : ils expliquent en gros qu'il est pour le moment assez difficile d'observer des migrations franches des espèces végétales, en raison de la compétition avec les autres essences. Pour le chêne vert, il estiment la progression à environ 30m / an, ce qui est très faible par rapport à la progression des conditions climatiques. En somme, les essences forestières qui « voudraient » (ou pourraient) migrer le font beaucoup moins rapidement que prévu.

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